24 févr. 2009

Le match

Facile de se livrer au petit jeu de la comparaison entre la (nouvelle) politique made in USA et celle menée en France. N’empêche. Le contraste est souvent saisissant, notamment dans le domaine des "nouvelles techno" (qui commencent à ne plus l'être tant que ça).

L’approche top-down du web façon UMP est bien connue, et si elle témoigne d’une conception franchement étroite de l’apport potentiel d’Internet, elle s’est néanmoins montrée assez efficace pendant la campagne pour l’élection présidentielle.

Tout a été dit cependant sur la communication en ligne du gouvernement depuis, symbolisée par cet exemple magnifique :















sarkozy.fr (le site du candidat) versus elysee.fr (le site du président) : même charte graphique, même organisation de l'édition, même concours "ma binette partout", NSTV deviens PRTV...

On me rétorquera que les équipes d'Obama ont elles aussi modifié le site institutionnel de la Maison blanche, sans se priver d'y intégrer des éléments présents dans les sites du candidat Obama. Ce qui est indéniable.


J'ai pourtant l'impression, dans ce dernier cas, que ce qu'ont transféré les équipes d'Obama de la campagne à l'administration, ce sont des outils (et peu de contenu) qui servent un double principe de transparence et de responsabilité (accountability), en lieu et place, en France, de maigres media de communication politique on ne peut plus classique, simplement transposée sur le net.
Ce qui est d'autant plus dommage - on l'a vu avec Obama - que sur internet, la transparence et la responsabilité, ça paie politiquement (et économiquement, mais ce n'est pas le sujet).


Dernier exemple en date : recovery.gov versus relance.gouv.fr. Je cite ici Netpolitique, sur le site américain :
L’objectif principal de ce site est en réalité double : assurer d’une part une information régulière et exhaustive du public, qui aura accès aux données bruts, et inviter d’autre part les parties prenantes (les contribuables mais aussi les medias après tout) a jouer un rôle de filtre, de contrôleurs de gestion (allons, qui n’a jamais rêvé de jouer les inspecteurs des finances amateurs…) pour contrôler la bonne utilisation des milliards qu'ils ont finalement consenti à leur corps défendant.
En France, à l'inverse, aucune transparence, aucune responsabilité : on débite péniblement 1 000 projets (je suis sûr que le 1 001 ème était d'une importance bien moindre), dont le seul qui ait trait au numérique est...l'installation du wifi dans le TGV Est.
Comme le dit si bien Netpolitique :
[...] pour une option simple où l’on ne veut surtout pas déranger le contribuable, il y a aussi la version rapport annuel en ligne facon relance.gouv.fr

23 févr. 2009

Sudhir Venkatesh (bis)

Chouette note de lecture sur le dernier bouquin de Sudhir Venkatesh, Off the books, à lire sur La vie des idées.

(Les liens recencés dans la partie "Aller plus loin", au bas de la page, sont tout aussi intéressants)

17 févr. 2009

Back to business

Il semble plus que temps de reprendre les choses sérieuses.
Ne serait-ce que pour signaler l'arrivée Morning Meeting, un blog label rouge, de ces blogs qui donnent envie d'avoir la curiosité et la précision de son auteur.

Sinon je viens de finir la lecture d'un bouquin absolument génial, quoiqu'écrit à la truelle : Gang Leader for a Day: A Rogue Sociologist Takes to the Streets, par Sudhir Venkatesh. L'auteur, sociologue, prof à Columbia (excusez du peu), y développe le récit de son expérience fondamentale : pendant plusieurs années, il s'est intégré au millieu des "high rises" (les cités) de Chicago, les pires des Etats-Unis. Un gang leader, J.T., lui a ouvert les portes de l'économie souterraine qui structurait cette société en quasi-vase clos. Il en a tiré des enseignements d'une richesse incroyable (repris, entre autres, dans Freakonomics, dont je vous avais parlé ici), battant en brèche la plupart des lieux communs qui forgent notre perception forcément distante de ce qu'il est convenu d'appeler les milieux les plus défavorisés.

Tout ceci me rappelle une des meilleures séries qu'il m'ait été donné de regarder : The Wire - là aussi, une dissection minutieuse des rouages des blocks de Baltimore. Et là aussi, une fatalité qui laisse coi.

4 nov. 2008

Tonight is the night

La première saison de la série « Obama » va s’achever ce soir, après un ultime twist dans le scénario de l’épisode d’hier soir : le décès de sa grand-mère et mentoresse.
L’homme passé maître dans l’art d’écrire le scénario de sa propre histoire (ok il a copié sur ma série préférée) n’a plus à cette heure qu’à patienter et espérer (c’est son domaine remarque).

Normalement cela devrait être plié très tôt dans la matinée (pour certains ça l’est déjà, notez).
C’est en tout cas ce que j’espère quoi qu’il arrive.

Une certaine fébrilité m’étreint aujourd'hui. Je suis le parcours du bonhomme depuis longtemps, et vous aurez compris qu’il m’inspire une certaine passion. Surfaite, j’en conviens : je ne connais les Etats-Unis que par ce que j’en lis et vois, et ne suis qu’infinitésimalement concerné par son action directe.

Mais tout de même : cet homme, à partir de pas grand-chose, a battu une des plus formidables machines de guerre politique de tout les temps : les Clinton. Ce soir il semble en passe de battre la plus efficace : les Républicains.
Et ce en disant un nombre de conneries remarquablement réduit.

C’est quand même la classe. La classe américaine même.

27 oct. 2008

Petit retour sur la campagne électorale américaine

Pas un sondage qui n’indique une victoire confortable d’Obama si l’élection avait lieu aujourd'hui. Comment pourrait-il en être autrement ?

Je ne m’étendrai pas sur la possibilité d’un « effet Bradley », en laquelle je crois peu (l’existence d’un effet Bradley inversé étant tout autant possible) ; les vrais risques pour les démocrates se trouvent ailleurs, à mon sens :
- Un effet « underdog » (outsider) pour McCain
- Une démobilisation d’électeurs indépendants/démocrates qui pensent que l’élection est pliée
- Mais surtout, surtout, un évènement extérieur qui vienne déstabiliser l’équilibre actuel des motivations du vote

Aujourd'hui l’économie a relégué la guerre d’Irak et le terrorisme au second plan. Mais souvenons nous : en 2004, 4 jours avant l’élection, Al Jazeera diffuse une vidéo d'Oussama Ben Laden menaçant les Etats-Unis de nouveaux attentats. S’il est impossible de déterminer le poids réel de cette vidéo dans la victoire de « W », nul doute qu’en instillant cette menace Ben Laden a, dans la dernière ligne droite, imposé son tempo et ramené nombre d’électeurs dans le camp républicain, perçu comme mieux à même de combattre les terroristes. Selon de nombreux analystes, c’était d’ailleurs son objectif : quoi de mieux pour un terroriste en quête de recrutement qu’un adversaire comme George Bush Jr. ?

Sur des forums de discussion djihadistes certains ne s’en cachent d’ailleurs pas : ils souhaitent ouvertement l’élection de McCain, plus capable selon eux rassembler contre les Etats-Unis. Entendons-nous bien : je ne fais pas de la préférence de certains terroristes pour McCain un argument pour Obama per se. Je note juste qu’Al Quaeda et consorts ont eux aussi une stratégie électorale, et qu’il n’est pas exclue qu’ils y aient recours en 2008.

Pour autant, une nouvelle vidéo de Ben Laden suffirait-elle à faire passer McCain devant ? J’en doute fort. Je pense qu’en 4 ans les électeurs américains ont appris, et qu’ils ne souhaitent plus se faire dicter leur vote par la peur. Je pense en outre qu’Obama a acquis les galons (et les soutiens) suffisants pour apparaître comme un Commander in Chief capable de faire face aux grands enjeux internationaux dans un contexte anxiogène ; c’est d’ailleurs là sa force (et sa grande prise de risque) : susciter l’espoir là où son adversaire joue sur la peur.

Bref, j’ai peine à voir ce qui empêcherait à ce stade Obama d’être élu le 4 novembre. Et c’est bien ce qui m’inquiète : ce consensus. Pas seulement dans la presse française (comme le dit Narvic, si Obama est élu : "On vous l'avait bien dit !" et si McCain est élu : "La formidable surprise !"), mais surtout dans la presse US. Effectivement, ça part en vrille dans le staff de campagne de McCain, les scandales se succèdent (150 000 $ de fringues pour qui se prétend représenter les classes moyennes, c’est pas mal. En même temps, chez nous c’est moitié moins, mais en maquillage)… Mais c’est sur cette base que les républicains aiment à rebondir, toujours. De la bouche de McCain lui-même :

We've got them just where we want them !

Tout de même, j’avoue ne pas croire à une défaite d’Obama. Et c’est peut-être ça qui m’inquiète le plus ;-)